Episode 7 - mercredi 28 mai 25

Avez-vous déjà observé comment certains détails nous échappent quand l'émotion nous submerge ?

Thomas Duchesne descend silencieusement les escaliers de la mairie, ses pas étouffés dans le silence de l'après-midi. Dans sa poche, son téléphone vibre encore : un nouveau message de son frère parisien. "Tu as vu Ruud? Éliminé !" Thomas s'arrête sur le palier du premier étage. Casper Ruud, double finaliste, battu par un inconnu. Parfois, le tennis ressemble à la vie : imprévisible et cruel.

L'émotion le saisit quand il repense à cette conversation de ce matin avec Lucie. "Papa, pourquoi Tsitsipas a perdu contre un qualifié ?" Sa fille ne comprend pas encore que le tennis, comme l'existence, ne respecte aucune hiérarchie établie. Matteo Gigante, sorti des qualifications, vient d'écrire une page d'histoire.

Connaissez-vous cette beauté particulière des exploits inattendus ?

Arrivé au rez-de-chaussée, Thomas croise Martine qui range des dossiers. "Alors, vos champions ?" demande-t-elle avec un sourire complice. Thomas hausse les épaules. "Les favoris tombent, les outsiders brillent. C'est ça, Roland Garros." Il ne dit pas qu'il pense à 1989, à cette demi-finale qu'il n'a jamais jouée.

Ce midi, Thomas a décidé de déjeuner au Café des Trois Marches. Il commande une bavette à la plancha avec des frites maison - un délice qui lui rappelle pourquoi il aime tant ce lieu. L'idée de savourer son plat l'enchante, d'autant qu'il doit finaliser son projet personnel : un petit média local qui raconterait la vie de Montrichard autrement. Depuis des mois, il collecte des anecdotes, observe les petits événements du quotidien, note les transformations de sa ville.

Avez-vous déjà ressenti cette envie de raconter votre territoire différemment ?

Au café, savourant encore le goût de cette bavette parfaitement grillée, Thomas sort discrètement son carnet. Il y note l'histoire d'Yvette qui se lève la nuit pour écouter le chant du rossignol, celle de la boutique de Marie qui propose des articles religieux. Vingt pages déjà remplies d'histoires simples qui font la richesse d'une ville. Peut-être qu'un jour, ce travail intéressera quelqu'un.

Dans l'après-midi, Thomas a prévu quelque chose d'inhabituel. Au lieu de regarder les matchs, il va emmener Lucie interviewer Madame Durand, la fleuriste, qui ferme boutique après quarante ans. "Pour mon projet," lui a-t-il dit. Elle ne sait pas encore que ces chroniques, c'est aussi pour elle, pour qu'elle comprenne la richesse de sa ville.

En 1989, Thomas Duchesne rêvait de surprendre les favoris à Roland Garros. En 2025, c'est Matteo Gigante qui réalise ce rêve à sa place. Et tandis qu'il referme son carnet au café, Thomas se dit que peut-être, comme au tennis, les plus beaux projets naissent dans l'ombre, loin des projecteurs.

Sur les rives du Cher, l'après-midi s'étire paisiblement, indifférent aux bouleversements parisiens. Thomas se dit que ces passions silencieuses qui se construisent jour après jour, ces projets modestes qui préservent la mémoire vivante de nos territoires, méritent peut-être autant d'attention que les exploits parisiens.

Si vous avez manqué le 1er épisode